À propos d'Orgueil et préjugés de Jane Austen
Jane Austen croque à la pointe sèche le milieu étriqué et bourgeois où elle a vécu et souffert. Précise, impitoyable, elle s’en tient strictement aux faits – she sticks to the facts : pas de fiction, pas de verbiage, pas de bavardage sentimental, un regard nu, cru, avec en creux, une ironie cinglante, jusqu’au sarcasme… La verte Angleterre ressemble au jardin d’éden mais ses habitants ont réussi à la transformer en enfer… À croire que ces bipèdes, mâles et femelles, souffrent en permanence d’un torticolis, ils ne lèvent jamais les yeux au ciel… Partout et toujours, bataille d’intérêts. Les sentiments ? Monnaie de singe. La religion ? Morale des convenances. Mais un très bon débouché, après tout… Comme le mariage pour une fille pauvre… Justement, tout s’achève en avantageux mariages – Jane Austen, et sa sœur, elles, resteront vieilles filles… La coda se déclinerait-elle sur le rassurant Tout est bien qui finit bien ? Les apparences sont trompeuses. Pour preuve, une réflexion de « l’héroïne » à propos de l’homme qu’elle va épouser : « Il était généreux, il avait les moyens de l’être. » Ou encore, la même, peu après le joyeux dénouement, évoquant sa sœur aînée dans une lettre à son oncle : « Je suis plus heureuse que Jane elle-même, parce qu’elle sourit alors que moi, je ris. »… Même les bonheurs se comparent, s’évaluent, se jaugent, au poids, comme on mord une pièce de monnaie pour vérifier sa teneur…
Dur.
Roland Dormans
« L’orgueil, observa Mary qui se piquait de psychologie […] se rapporte plus à l’opinion que nous avons de nous-mêmes, la vanité, à celle que nous voudrions que les autres aient de nous. »
Jane Austen, Orgueil et préjugés
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